Mémentos - Droit pénal spécial - 5e - 37

CHAPITRE 2 - Les atteintes volontaires à la vie
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Point de jurisprudence
La tentative d'empoisonnement
Cass. crim., 17 déc. 1874 : Bull. crim., no 309 ; S. 1875, 1, p. 385, note Villey : « si, dans le
cas où le poison a été employé ou administré, le crime d'empoisonnement est consommé,
quelles qu'en aient été les suites, il n'en résulte pas nécessairement que la tentative de ce
crime ne puisse se manifester par un commencement d'exécution, indépendant de l'emploi
ou de l'administration du poison ; que ce commencement d'exécution peut résulter notamment
de ce que le poison aurait été jeté dans les aliments qui devaient servir à la personne
qu'on voulait empoisonner ».
Cass. crim., 5 févr. 1958 : Bull. crim., nº 126 : « constitue le crime de tentative d'empoisonnement
le fait de jeter dans l'eau du puits alimentant la propriété d'un tiers, un produit dont la
présence dans l'eau de boisson était de nature, selon les constatations souveraines des juges,
à provoquer des phénomènes d'intoxication lente pouvant aboutir à la mort d'un être
humain ».
B- L'élément moral de l'empoisonnement
Tout comme le meurtre, l'empoisonnement est une infraction intentionnelle qui requiert
la démonstration de l'animus necandi,c'est-à-dire de la volonté de tuer. Cette définition,
désormais acquise, est la résultante du débat relatif à l'affaire du sang contaminé
par le VIH, dans les années 1990.
Pour aller plus loin
L'affaire du sang contaminé
Dans l'affaire du sang contaminé, qui eut lieu au début des années 1990, les responsables et
dirigeants du centre national des transfusions sanguines, ainsi que des médecins et divers
responsables politiques, furent poursuivis des chefs de plusieurs infractions délictuelles pour
avoir écoulé des lots de sang potentiellement contaminés par le VIH. Mais les parties civiles
souhaitaient que les faits soient requalifiés en crime d'empoisonnement. La jurisprudence eut
alors à trancher le débat suivant : l'empoisonnement suppose-t-il la volonté de tuer (ce que,
bien évidemment, les médecins et dirigeants de centre ne voulaient pas), ou bien la simple
conscience d'administrer des substances mortelles suffit-elle à caractériser l'intention
coupable ? (en l'espèce, ces protagonistes avaient conscience de prendre un risque mortel en
écoulant ces stocks de sang). L'argumentation reposait sur la différence de rédaction des deux
textes : en effet, l'article 221-5 définit l'empoisonnement comme le « fait d'attenter à la vie
d'autrui par l'emploi ou l'administration de substances de nature à entraîner la mort », non
comme le « fait de donner volontairement la mort », expression réservée au meurtre (art. 221-1).
Mais cette interprétation fut rejetée par la chambre criminelle à plusieurs reprises dès le premier
arrêt rendu dans l'affaire du sang contaminé (Cass. crim., 22 juin 1994, nº 93-83900 :
Bull. crim., nº 248). L'élément moral du meurtre et de l'empoisonnement est donc le même,
en dépit d'une rédaction différente des textes : l'intention de tuer - c'est-à-dire l'animus
necandi - est requise pour ces deux crimes, comme la Cour de cassation l'a plusieurs fois
répété.
Cass. crim., 2 juill. 1998, nº 98-80529 : Bull. crim., nº 211 : « la seule connaissance du
pouvoir mortel de la substance administrée ne suffit pas à caractériser l'intention homicide ».
Cass. crim., 18 juin 2003, nº 02-85199 : Bull. crim., nº 127 : « le crime d'empoisonnement ne
peut être caractérisé que si l'auteur a agi avec l'intention de donner la mort, élément moral
commun à l'empoisonnement et aux autres crimes d'atteinte volontaire à la vie de la
personne ».

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