Les Carrés Rouge - L'essentiel des Grands arrêts du droit du travail 2017-2018 - 2e - 54

L'ESSENTIEL

DES

GRANDS

ARRÊTS DU

DROIT

DU TRAVAIL

5 Cass. soc., 26 oct. 2010, nº 09-42740
Une sanction disciplinaire ne peut être prononcée contre un salarié que si elle est prévue par le règlement intérieur de
l'entreprise, et une mise à pied disciplinaire prévue par ce règlement intérieur n'est licite que si ce règlement précise sa
durée maximale.

■ Faits
Un salarié a été sanctionné par une mise à pied disciplinaire de cinq jours ouvrés par son employeur. Les juges du fond
ont refusé d'annuler la sanction, tout en écartant la clause du règlement intérieur faute d'être limitée dans sa durée,
en jugeant que cette sanction est inhérente au pouvoir disciplinaire de l'employeur, lequel a la faculté, en l'absence
de dispositions restrictives d'un règlement intérieur ou d'une convention collective, d'en faire usage, sous le seul
contrôle de l'autorité judiciaire. À la suite du pourvoi en cassation du salarié, la Cour de cassation prononce la cassation de l'arrêt au visa des articles L. 1321-1 et L. 1331-1 du Code du travail.

■ Portée
L'arrêt du 26 octobre 2010 se prononce pour la première fois sur deux questions de principe relatives au droit disciplinaire au sein de l'entreprise, et ce depuis les modifications apportées par la loi du 4 août 1982 ayant encadré le
pouvoir disciplinaire de l'employeur. Il est affirmé qu'une sanction disciplinaire ne peut être prononcée que si elle est
prévue par le règlement intérieur et que la mise à pied disciplinaire n'est licite que si le règlement intérieur en précise
sa durée maximale.
S'inspirant de certains principes de droit pénal, la loi du 4 août 1982 a modifié la nature du pouvoir disciplinaire de
l'employeur pour instaurer, au sein de l'entreprise, un droit disciplinaire plus formaliste en imposant la rédaction d'un
règlement intérieur, une procédure disciplinaire (respect du contradictoire avec un entretien préalable et une obligation
de motivation de la sanction), une proportionnalité de la sanction à la faute ainsi que des règles de prescription des
faits fautifs (deux mois après la connaissance des faits) et de péremption du droit de sanctionner (un mois après
l'entretien préalable), les juges ayant ajouté le principe non bis in idem. Mesure exorbitante du droit commun, la mise
à pied disciplinaire permet à l'employeur de suspendre unilatéralement l'exécution du contrat en cas de faute du
salarié ; elle constitue une sanction au sens de l'article L. 1331-1 du Code du travail en ce qu'elle est « de nature à
affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise [et] sa rémunération ».
Instaurant un principe de légalité des sanctions disciplinaires, l'article L. 1321-1 du Code du travail dispose que : « Le
règlement intérieur est un document écrit par lequel l'employeur fixe exclusivement : [...] 3º Les règles générales et
permanentes relatives à la discipline, notamment la nature et l'échelle des sanctions que peut prendre l'employeur ». Il
est obligatoirement établi dans les entreprises employant au moins 20 salariés (C. trav., art. L. 1311-2), après consultation du comité d'entreprise (ou, à défaut des délégués du personnel) et du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (pour les clauses relatives à la santé et la sécurité) et notification à l'inspecteur du travail qui en vérifie la
légalité (C. trav., art. L. 1321-4), pour enfin être affiché à l'attention des salariés. Dans les autres entreprises, le règlement intérieur est facultatif (mais conseillé). Un arrêt de 1987 avait jugé, pour des faits antérieurs à la loi du 4 août
1982 et au visa de l'article 1134 du Code civil, que « la sanction de mise à pied est inhérente au pouvoir disciplinaire
de l'employeur, lequel a la faculté, en l'absence de dispositions restrictives d'un règlement intérieur ou d'une convention collective, d'en faire usage sous la seule réserve du contrôle de l'autorité judiciaire ». En l'espèce, la cour d'appel
de Rennes, reprenant ce précédent, avait affirmé que l'employeur, en l'absence de dispositions restrictives d'un

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