Droit et Société Classics - Les métamorphoses de la régulation politique - 1re - 134

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La régulation politique au regard des disciplines

venue « d'en haut », un droit né du social et de son effervescence, un
droit qui a ses sources dans le social, un droit « immergé dans le social » 97
et que, par conséquent, la régulation juridique ne pouvait être quasi
exclusivement rapportée à une régulation top down mais pouvait bien
aussi s'inscrire dans des formes de régulation bottom up des sociétés 98.
Tout comme on a pu observer une « sociologisation » de la science
politique, non plus seulement préoccupée du fonctionnement de l'État,
du gouvernement, des institutions, du personnel politique mais de ce qui
se passe dans la société, il est aussi illustratif que la sociologie du droit
française qui était presque exclusivement une sociologie du droit de
l'État s'est ouverte à des courants de recherche établis à l'étranger et
mettant au centre de leurs analyses, l'individu ordinaire ou les
mobilisations collectives de citoyens ordinaires dans leurs rapports au
droit. Le succès d'un courant américain comme celui des « Legal
Consciousness Studies », les débats qu'il a provoqués et les dépassements qui s'en sont ensuivis 99 sont particulièrement illustratifs de ce
qu'on peut considérer comme un véritable changement de régime de
connaissance en la matière.
De telles évolutions découlent des interrogations qui portent, d'une
part, précisément, sur le régime de connaissance susceptible de les
analyser, d'autre part, sur la prise en considération plus que jamais
nécessaire de la dimension politique du droit.
La pensée française des années 1960-1980 a été particulièrement
inspirée par le paradigme de la domination 100. On observait ainsi la
perpétuation du monopole d'une représentation de l'ordre juridique
comme de l'ordre politique « top down » d'où découlait une vision de
l'État « moderne » (ce modèle d'État dont nous avons vu supra la remise
97.

Jean-Guy BELLEY, « Le "droit social" » de Gurvitch : trop beau pour être vrai ? »,
Droit et Société, 88/2014, p. 733-734.
98. Jacques COMMAILLE, À quoi nous sert le droit ?, Paris Gallimard, coll. « Folio Essais »,
2015.
99. Ces dépassements prennent notamment la forme, à l'opposé des travaux relevant
du courant américain du « legal consciousness » qui sont majoritairement fondés
sur la conception du droit comme une variable indépendante, l'objectif étant
d'observer le rapport au droit officiel chez les citoyens ordinaires, de concevoir le
droit comme une variable dépendante, l'objectif devenant alors d'observer les
formes multiples d'appropriation du droit, de création de règles, par les citoyens
ordinaires, retrouvant ainsi l'idée de « living law » d'Eugen EHRLICH. Voir : Marc
HERTOGH, « A "European" Conception of Legal Consciousnesss: Rediscovering Eugen
Ehrlich », Journal of Law and Society, vol. 31, Number 4, Dec. 2004, p. 457-481 ;
voir également : Brian Z. TAMANAHA, A General Jurisprudence of Law and Society,
Oxford University Press, 2001.
100. Jacques COMMAILLE, À quoi nous sert le droit ?, op.cit.

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