Doctorat et Notariat - L'organisation de la liquidation du passif successoral - Tome 50 - 122

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L'ORGANISATION DE LA LIQUIDATION DU PASSIF SUCCESSORAL

droits et biens indivis d'autre part. L'ajustement de la théorie de la personnalité
morale et du principe de la continuation de la personne du défunt postule la survie fictive du de cujus dont la personnalité juridique serait pérennisée. La fiction
permettrait de tolérer l'atteinte que l'absence de droit de propriété des héritiers
porte à la fonction de la succession en tant que mode d'acquisition de la propriété
des biens du de cujus par ses héritiers (art. 711 et 721 C. civ.). Mais elle aboutirait
à un report de la transmission successorale au jour du partage de l'indivision,
contraire au principe du droit français de succession immédiate. Il est vrai que
l'effet déclaratif du partage permettrait judicieusement de coordonner la transmission différée de la succession à l'exigence de l'acquisition immédiate de la propriété des héritiers. La théorie de la personnalité morale n'en serait pas moins
artificielle dans les indivisions durables dans lesquelles les actes accomplis par les
indivisaires seraient censés l'être par le défunt. À l'inverse, la théorie de la propriété collective s'agence parfaitement avec le principe de la continuation de la
personne du défunt, appréhendé dans son sens concret de substitution des héritiers aux lieu et place du de cujus136. Dès le décès, les héritiers acquièrent la propriété des biens du défunt. Au lieu d'être fragmentée entre les héritiers, comme
elle l'était dans la conception classique de l'indivision, la propriété du de cujus est
acquise et exercée par la collectivité des héritiers. Celle-ci peut user des attributs
de la propriété dans le cadre d'une gestion souple des biens indivis, ainsi que le
faisait le de cujus. Au regard du passif successoral, la solidarité des indivisaires
poursuivis sur les biens indivis permet de préserver le gage des créanciers successoraux tel qu'il existait du vivant de leur débiteur.
182. C'est dire que si les théories de la personnalité morale et de la propriété
collective permettent chacune de fonder l'autonomie patrimoniale de l'indivision,
la théorie de la propriété collective s'harmonise plus volontiers avec le principe de
la continuation de la personne du défunt par l'héritier tandis que la théorie de la
personnalité morale emporte plus généralement altération des principes du droit
successoral. La mise à l'épreuve des théories au régime juridique de l'indivision
permettra de se prononcer définitivement sur leur valeur explicative.
II. LA NATURE DE L'INDIVISION à L'ÉPREUVE
DE SON RÉGIME jURIDIQUE
183. « La double face du régime juridique de l'indivision »137. La finalité collective progressivement accordée à l'indivision l'a dotée d'un régime dualiste tourné
d'un côté « vers le respect des droits individuels et fondamentalement égaux de chacun des indivisaires » et d'un autre, « vers une gestion rationnelle de l'indivision
inspirée par les exigences de l'intérêt commun »138. Jusqu'à la réforme du 23 juin
2006, il était malaisé d'appréhender la nature de l'indivision confrontée à la dualité collective et individuelle du régime de l'indivision139. L'établissement de la
règle de la majorité pour les actes ressortissant d'une exploitation normale des
biens indivis a rendu plus pressant l'attraction de l'indivision vers son pôle communautaire. Il n'empêche que le régime de l'indivision présente toujours une
136. No 14.
137. L'expression est empruntée à l'intitulé d'un article de Monsieur Partarin : in Mélanges
dédiés à D. Holleaux, Litec, 1990, p. 331 et s.
138. J. Patarin, art. préc., p. 332.
139. F.-X. Testu, « Sur la nature de l'indivision », D. 1996.176.

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