Mémentos - Droit des libertés fondamentales - 5e - 165

CHAPITRE 9 - La liberté d'aller et venir et le droit au respect de la vie privée
B - Protection des données personnelles dans les fichiers
206. Les fichiers contenant des données personnelles doivent respecter plusieurs
exigences constitutionnelles et européennes.
Notamment, la création d'un fichier doit répondre à un but légitime. La sauvegarde de
l'ordre public justifie particulièrement la création de fichiers de police. Cette conciliation
entre ordre public et liberté est opérée par le législateur sous le contrôle des juges, ce qui
est fréquemment rappelé par le Conseil constitutionnel. Par exemple, dans sa décision
du 29 novembre 201350
, le Conseil constitutionnel a précisé ce cadre constitutionnel. Il
a rappelé qu'il incombe au législateur, en application de l'article 34 de la Constitution,
de fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour
l'exercice des libertés publiques ainsi que la procédure pénale. Dans ce cadre, il lui
revient « d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre
public et la recherche des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde
de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d'autre part, le respect des
autres droits et libertés constitutionnellement protégés ».
De même, la Cour européenne des droits de l'Homme ne s'oppose pas à la création de
fichiers de police s'ils répondent aux garanties du droit au respect de la vie privée. Par
exemple, dans les arrêts B. B. c/ France, Gardel c/ France et M. B. c/ France du
17 décembre 2009, la Cour réaffirme le rôle fondamental de la protection des données
personnelles soumises à un traitement automatique, surtout à des fins policières, et
conclut que l'inscription des requérants au Fichier judiciaire national automatisé des
auteurs d'infractions sexuelles n'est pas contraire à l'article 8.
En outre, la lutte contre le terrorisme constitue a fortiori un objectif légitime : « Les
sociétés démocratiques se trouvent menacées de nos jours par des formes très
complexes d'espionnage et par le terrorisme, de sorte que l'État doit être capable, pour
combattre efficacement ces menaces, de surveiller en secret les éléments subversifs
opérant sur son territoire »51
.
Dans cette affaire, la Cour conclut à la non-violation de l'article 8 : la loi contestée par les
requérants (portant restriction du secret de la correspondance, des envois postaux et des
télécommunications) est considérée par la Cour comme nécessaire, dans une société
démocratique, à la sécurité nationale, la défense de l'ordre et la prévention des infractions
pénales.
207. Un autre but d'intérêt général peut être celui de la santé publique. Par exemple,
dans la décision du 12 août 200452
, face à la création d'un dossier médical contenant
des données à caractère personnel, le Conseil constitutionnel souligne les objectifs
constitutionnels de protection de la santé et d'équilibre financier de la sécurité sociale :
« Considérant que la liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration des droits de
l'Homme et du citoyen de 1789 implique le droit au respect de la vie privée ; que ce
droit requiert que soit observée une particulière vigilance dans la collecte et le traitement
de données à caractère personnel de nature médicale ; qu'il appartient toutefois
--
50. Cons. const., 29 nov. 2013, nº 2013-357 QPC, Société Wesgate Charters Ltd [Visite des navires par les
agents des douanes].
51. CEDH, 6 sept. 1978, Klass et autres c/ Allemagne.
52. Cons. const., 12 août 2004, nº 2004-504 DC, Loi relative à l'assurance maladie.
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