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FABIEN TERPAN

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de délégués des parlements nationaux, comme les peuples des treize colonies
américaines pouvaient l'être au sein de la Convention de Philadelphie. La participation d'autres membres que les délégués des parlements nationaux, représentant les gouvernements nationaux, la Commission et le Parlement européen, éloigne le cas européen du cas américain. Toutefois, la composition hétérogène de la Convention européenne ne suffit pas à réfuter l'existence d'un
pouvoir constituant européen, et pour cause : le recours à une assemblée
constituante n'est pas une condition indispensable à l'élaboration des constitutions étatiques. Certaines constitutions, en effet, sont rédigées par le gouvernement ou par un comité d'experts désigné par le gouvernement, comme ce
fut le cas pour la Constitution française de la Ve République. Le fait que la
Convention européenne abandonne à la CIG la signature du traité de révision
n'est donc pas significatif.
Au stade de la ratification, la possibilité de choisir entre la voie parlementaire
et le référendum n'est pas contraire à la pratique des États. La loi fondamentale
allemande de 1949, par exemple, a été ratifiée par les parlements des différents
Länder, et non par référendum. Il n'apparaît pas que la ratification par un référendum organisé au niveau de l'Union ou dans les États membres soit un élément
indispensable pour que la procédure revête un caractère constituant. Le « pouvoir
fondateur des États », exprimé lors de la signature mais aussi de la ratification des
traités, est « l'équivalent fonctionnel du pouvoir constituant »19.
Le débat sur l'origine populaire de la constitution ne se situe pas uniquement
au niveau procédural. Selon la théorie classique, pour qu'il y ait constitution
européenne, il faudrait qu'il existe « un » peuple européen au lieu - ou en plus -
« des » peuples nationaux. Ce peuple européen, exerçant le pouvoir constituant,
serait seul à même de légitimer la constitution européenne. L'existence d'un fort
degré de cohésion entre les citoyens, soit sous la forme d'un désir de vivre
ensemble, soit sous la forme d'une unité ethnique, linguistique, culturelle, serait
donc une condition indispensable, non satisfaite dans le cas européen.
Plusieurs arguments contredisent ce postulat. Tout d'abord, la question de
l'existence ou non d'un peuple européen (au sens d'une communauté unie par
des caractéristiques sociologiques) est sans incidence sur celle du constitutionnalisme européen. Adopter une conception sociologique du peuple poserait des
problèmes juridiques (le critère de la cohésion est difficile à objectiver) et éthiques
(tout particulièrement si on définit la cohésion sur la base de critères ethniques).
Par ailleurs, l'idée qu'il existe un peuple européen n'est pas sans fondement20.
A minima, on peut s'appuyer sur une définition du peuple limitée à l'existence
d'un lien juridique entre la communauté politique et les individus : dans le cas
de l'UE, ce lien serait établi par la citoyenneté européenne, aujourd'hui clairement établie par le traité sur l'Union (art. 9, 10 et 11)21. Plutôt que de faire du
19. G. Marti, Le pouvoir constituant européen, Bruylant, 2011, p. 123.
20. F. Chaltiel, La naissance du peuple européen, Odile Jabob, 2006.
21. Pour une définition juridique minimale du peuple européen : T. Schmitz, « Le
peuple européen et son rôle lors d'un acte constituant dans l'Union européenne », Revue du
droit public, no 6, 2003, p. 1709-1742.

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