Systèmes - Le droit de la régulation des jeux d'argent - 1re - 73

Les modes de régulation des jeux d'argent et de hasard

183. Mais une fois le positionnement des instances européennes compris, encore faut-il déterminer les conditions requises et prévues pour qu'un
État membre puisse instituer légalement une dérogation à l'application de
ces grands principes du marché commun dans le secteur des jeux ; appréciation des conditions qui revient à la CJUE et qui explique les nombreuses
décisions rendues depuis le début des années 199062. Sur ce point, l'analyse
de la jurisprudence de la Cour livre des enseignements précieux.
184. Les objectifs spécifiques des réglementations - au premier rang
desquels se trouvent la lutte contre le jeu excessif ou pathologique, la surveillance des opérations de jeux, la lutte contre la fraude et le blanchiment
d'argent - qui ont été validés par le passé par la Cour63 peuvent être invoqués par les États membres. Plus largement, l'arrêt du 19 décembre 2018
rendu par la Cour rappelle que les considérations en lien avec la protection
du consommateur64, la santé publique liée aux jeux65, l'ordre public et la
sécurité publique66 sont autant de moyens qui peuvent être invoqués à l'appui d'une réglementation nationale dérogeant aux principes du TFUE. En
revanche, les considérations techniques et financières ne sauraient à elles
seules permettre une telle réglementation dérogatoire67.
185. Au-delà des motifs qui peuvent permettre à l'État de restreindre la
concurrence dans ce secteur, la CJUE est venue définir une condition complémentaire. Elle considère en effet que les restrictions mises dans les
réglementations nationales doivent permettre de remplir les objectifs qu'elles définissent (ce qui était qualifié par Denis Alland comme « le principe
d'adéquation appliqué aux jeux »68) et ne doivent pas dépasser ce qui est
62. V. ALLAND D., op. cit., qui les répertorie et v. : CJCE, 24 mars 1994, Schindler, aff. C-275/92 ;
CJCE, 21 sept. 1999, Läärä e.a. c/Kihlakunnansyyttäjä (Jyväskylä) et Suomen valtio (État finlandais), aff. C-124/97, Rec. CJCE I-6067 ; CJCE, 21 oct. 1999, Questore di Verona c/Diego
Zenatti, aff. C-67/98 (concl. FENNELLY L.), Rec. CJCE, I-7289 ; CJCE, 11 sept. 2003, Anomar e.
a. c/Estado português, aff. C-6/01 (concl. TIZZANO A.), Rec. CJCE I-8621 ; CJCE, 6 nov. 2003,
Piergiorgio Gambelli e.a., aff. C-243/01 (concl. ALBER S.), AJDA 2004. 315, chron.
BELORGEY J.-M., GERVASONI S. et LAMBERT C. ; Rec. CJCE I-13031 ; CJCE, 13 nov. 2003, Diana
Elisabeth Lindman, aff. C-42/02 (concl. TIMMERMANS), Rec. CJCE I-13519 ; CJCE, 6 mars
2007, Massimiliano Placanica, Christian Palazzese, Angelo Sorricchio, aff. C-338/04 (concl.
RUIZ-JARABO COLOMER), Rec. CJCE I-1815 ; CJCE, 13 sept. 2007, Commission c/République
italienne, aff. C-260/04 (concl. SHARPSTON), Rec. CJCE I-7083 ; CJCE, 8 sept. 2009, Liga Portuguesa de Futebol Profissional, Bwin International Ltd, aff. C-42/07 (concl. BOT Y.) ; CJCE,
6 oct. 2009, Commission c/Royaume d'Espagne, aff. C-153/08 (concl. MENGOZZI P.) ; CJCE,
25 févr. 2010, Santa Casa da Misericórdia de Lisboa, aff. C-55/08 ; CJCE, 3 juin 2010, The
Sporting Exchange Ltd, aff. C-203/08 et Ladbrokes Betting & Gaming Ltd, aff. C-258/08
(concl. BOT Y.).
63. Pour un rappel, v. CJUE, 22 janvier 2015, Stanley International Betting et StanleyBet Malta,
aff. C-463/13, préc.
64. Point 40 ; v. aussi point 48 de CJUE, 22 janvier 2015, Stanley International Betting et StanleyBet Malta, C-463/13, préc.
65. Point 41.
66. Point 41.
67. V. points 48 et 52 de CJUE, 30 juin 2011, ZeTurf, aff. C-212/08, préc.
68. Op. cit.

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