Fonction Publique - La déontologie dans la fonction publique - 2e - 165

Chapitre 2 * L'enrichissement statutaire depuis avril 2016
de la déontologie des fonctionnaires

Quid d'une enseignante décidant d'associer à la minute de silence le décès des
terroristes tués par les commandos de fonctionnaires ? Le message pédagogique est encore plus désastreux, car il vient percuter directement la raison
d'être et la justification de la minute de silence visant à amener les citoyens
- tous les citoyens, quel que soit leur âge - à entrer dans la logique non contestable, sur ce point, de la « République compassionnelle »258.
La réaction émotionnelle face à de tels évènements ne dispense pas d'adopter
une posture éthique et responsable devant des élèves traumatisés par le poids
des images et le choc des photos. La commission laïcité et fonction publique
installée en juin 2016 a rendu un intéressant rapport préconisant une approche
concrète des situations dans les formations liées à la laïcité partant du principe
selon lequel « la laïcité doit être expliquée et correctement appliquée »259. À la
suite de ce rapport, la circulaire du 15 mars 2017 relative au respect de la laïcité
dans la fonction publique a identifié les situations problématiques pour mieux
aider les agents publics à les gérer. Parmi les critères justifiant des poursuites
disciplinaires, la circulaire mentionne la réitération du manquement et le degré
d'ostentation du signe d'appartenance religieuse, expression quelque peu subjective qui ne règle pas la question du port de pendentifs par exemple260.
Comment parler de façon éthique de la religion
lorsque l'on est professeur ?
En 1906, le sieur Girodet, professeur, affirma devant ses élèves, un an après l'adoption de la loi de
1905 sur la séparation de l'Église et de l'État, que « ceux qui croient en Dieu sont des imbéciles »
(T. confl., 2 juin 1908, Girodet c/ Morizot : Lebon, p. 597, concl. Tardieu). En 2005, un professeur de
géographie, Louis Chagnon, tient les propos suivants devant les élèves de sa classe de 5e d'un collège situé dans une zone urbaine sensible : « Mahomet va se transformer en voleur et en assassin »,
expression utilisée pour décrire un fait historique exact, à savoir le massacre par décapitation en
mai 627 de plusieurs centaines de Juifs de la tribu des Quraizah. À un siècle d'intervalle furent donc
exprimés deux propos excessifs et choquants pour décrire deux religions monothéistes. Dans les deux
cas, des poursuites ont eu lieu contre les enseignants, l'État ayant souhaité rappeler avec fermeté la
nécessité de ne pas choquer les élèves en se montrant exemplaire et responsable. Contrairement à
ce qu'écrivait le professeur Chagnon dans une tribune d'autodéfense (Chagnon A., « Peut-on parler
de l'Islam à l'école ? », Le Figaro 6 févr. 2004), l'État ne lui reprochait pas d'avoir enseigné sur l'Islam
mais d'avoir mal parlé de ce dernier, abandonnant ainsi la posture éthique attendue de tout enseignant. Il en va de même d'un enseignant qui, le 8 janvier 2015 (le lendemain de l'attentat contre
Richard M., La République compassionnelle, 2006, Grasset.
Zucarelli E., Laïcité et fonction publique, rapport remis à Mme la ministre de la Fonction publique, 9 déc.
2016.
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Bui-Xuan O., « Une application à géométrie variable de l'obligation de neutralité religieuse », AJFP 2017,
p. 249.
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